L'arete des Spitzkoepfe

La randonnée "alpine"... des Vosges mais attention nous ne sommes plus en Lorraine mais en Alsace...

Point de départ : Col de la Schlucht (88)

Difficulté : Randonnée sportive et assez difficile, pour pieds sûrs, elle ne doit être entreprise que par beau temps. Les sentiers sont bien balisés sauf pour la partie des Spitzkoepfe proprement dite. Le sentier des Roches est escarpé, par temps humide cet itinéraire peut être délicat.

Distance : un peu moins de 15 km
Dénivelé : 750 m. environ
Carte : IGN Top 25 - 3618 OT

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Période conseillée : En été et surtout le week-end il y aura beaucoup sur ces sentiers, au printemps, au début du mois de mai, les vues aériennes sur la forêt vosgienne sont magnifiques, en automne si le temps est relativement sec -sinon certains passages peuvent être dangereux- l'ambiance est fantastique et les chamois nombreux sur l'arête à se chauffer au soleil. En hiver c'est une véritable "course" qui ne peut être entreprise que par des alpinistes bien équipés.


Sur l'arête des Spitzkoepfe

Le point de départ de cette randonnée est un petit escalier ou figure la mention "sentier des Roches" qui se trouve à droite de la route lorsqu'on quitte le col de la Schlucht avant de descendre côté alsacien. L'histoire de ce col, qui à l'heure actuelle est sans doute un des endroits les plus célèbres des Vosges est intéressante. En fait cela fait relativement peu de temps que ce col sert de passage entre les Vosges et l'Alsace. En effet c'est en 1842 que Frédéric Hartmann, riche industriel de Munster et donc gros consommateur de bois fit construire à ses frais une route menant de l'Altenberg (où il fera d'ailleurs construire plus tard un hôtel qui sert désormais de maison de repos) au Collet afin d'y exploiter les bois situés côté vosgien. Un petit peu plus tard Napoléon III fit construire la route de Gérardmer au Collet, le "passage" du col de la Schlucht était né.

Avec la défaite de 1870, la Schlucht va devenir un poste frontière entre la France et l'Allemagne qui deviendra assez vite un endroit touristique avec la construction d'un tramway côté vosgien puis également côté alsacien, les premiers hôtels se construisent de part et d'autre de la frontière. On y trace une piste de ski. Pendant la guerre de 1914 à 1918 les militaires remplacent les touristes...

Le "sentier des Roches" est une création purement touristique que l'on doit à Monsieur Strohmeyer président du Club Vosgien et qui en 1906 eu l'idée de créer ce sentier de randonnée. Une oeuvre plutôt réussie puisque dès les premières centaines de mètres l'ambiance est donnée : des falaises granitiques magnifiques, du vide -attention à bien utiliser les mains courantes en place- et de magnifiques vues sur la vallée; petit pont, tunnel creusé dans la roche, échelles métalliques et même une splendide cascade font de ce sentier un des plus beaux des Vosges.

Lorsque la pente s'adoucit, le sentier balisé rectangle bleu rejoint un chemin carrossable qui monte tranquillement au lieu dit Frankental, un endroit magique entouré par les couloirs qui plongent du Hohneck 300 mètres plus haut et qui gardent la neige tard dans la saison et par la splendide falaise de la Martinswand terrain des jeux des grimpeurs depuis fort longtemps. Il y a une splendide tourbière à cet endroit qui porte le nom de Schwartzweiher, l'étang noir mais attention sa flore est fragile donc mieux vaut rester en retrait. Il y a également une ferme auberge qui témoigne qu'il n'y a pas si longtemps à la place de toute cette forêt existaient des pâtures pour les troupeaux; cette ferme fut même détruite en avril 1910 par une avalanche, il y avait encore de la neige dans ce temps là...


La Martinswand

Notre sentier balisé triangle bleu mais également rouge-blanc-rouge car nous sommes sur le GR 531 grimpe ensuite vers le Schaeferthal, une bonne grimpette qui peut être coupée en deux par une rapide visite à la Grotte Dagobert, une simple cavité naturelle qui aurait soit disant abrité le roi des Francs et son armée, on peut se demander comment...

Le Schaeferthal qu'on peut traduire par "vallon des moutons" est un endroit fabuleux lorsqu'il fait beau et que la vue porte loin jusqu'à la Forêt Noire voire jusqu'aux Alpes Bernoises si le temps s'y prête. La vue plonge de tous les côtés vers le Frankenthal d'où l'on vient mais aussi vers le Schiessrothried qui constitue la suite du parcours.


Le Schiessrothried vu depuis le Schaeferthal

De là le sentier part vers le sud est, un peu désagréable au début car très rocheux, il devient plus agréable mais plus raide après la ferme auberge du Schiessroth. On arrive assez vite au bord du lac d'où la vue sur le Hohneck et le magnifique vallon du Wormspel fait penser à un paysage alpin. Ce lac artificiel endigué à la fin du XIX ème siècle est aménagé à l'emplacement d'un vieux lac glaciaire formé il y a 10 000 ans environ à la fin de la dernière glaciation. Difficile d'imaginer que dans ce vallon si sauvage, les militaires français avaient installé durant la guerre de 1914 un véritable téléphérique destiné à amener vivres et munitions vers les postes avancés non loin de Mittlach.


Schiessrothried

Le sentier rectangle bleu grimpe dans la forêt de hêtres jusqu'à un point de vue qui offre une vue plongeante sur un autre lac plus secret, le Fischboedle mais nous n'irons pas aujourd'hui car nous quittons le sentier balisé pour grimper droit vers le premier Spitzkoepfe. On pénètre là dans une réserve naturelle qui est le domaine des chamois et de façon plus anecdotique celui du Berggeist, l'esprit de la montagne...


La partie raide du "sentier"

Il n'y a plus de sentier véritable mais des traces permettant de longer pendant un bon moment l'arête rocheuse. De vielles marques rouges sur les arbres permettent de trouver le meilleur cheminement mais il faut parfois bien regarder et ne pas hésiter à faire un petit détour. Attention, le versant sud des spitzkoepfe (qui signifie "têtes pointues") est rocheux et à pic sur une centaine de mètre par endroit !


La "sortie" des Spitzkoepfe

Le "sentier" emprunte de temps en temps des petits cols entre les différentes pointes de l'arête. Attention, le versant sud des spitzkoepfe (qui signifie "têtes pointues") est rocheux et à pic sur une centaine de mètre par endroit ! Il n'y a qu'à la fin de l'arête que le sentier passe côté sud pour contourner un des derniers promontoires rocheux. A condition d'être discret, il est fréquent d'observer des chamois tranquillement installés sur ces promontoires. Le chamois a été réintroduit (ou introduit ?) en 1956 dans la haute vallée de la Thur, les onze animaux lachés à cette date ont vite colonisé les versants les plus sauvages du massif et c'est maintenant près de 1 500 têtes qui occupent nos montagnes vosgiennes.


Chamois des Spitzkoepfe

Sortis des Spitzkoepfe on se retrouve sur le sentier qui va au col du Wormspel, on évitera ensuite le Hohneck, sa route, son restaurant et ses parkings à voitures et à autocars pour rejoindre en légère montée le col du Falimont. Au passage on remarquera les traces de l'ancienne voie de chemin de fer qui montait les touristes jusqu'en 1935 au sommet du Hohneck. Du col du Falimont, on pourra jeter un dernier coup d'oeil à la tourbière du Frankenthal et continuer sur un sentier en balcon jusqu'à l'entrée de la forêt des Trois Fours. On remarquera en passant ces hêtres qui ont bien du mal à poussé en raison du vent et de la neige et qui se tortillent plus qu'ils ne poussent.


Le Ballon de Guebwiller et les Alpes suisses vus depuis le Petit Hohneck

On longe ensuite la chaume des Trois Fours pour entrer une dernière fois dans la hêtraie d'altitude, le sentier suit la ligne de l'ancienne frontière encore marquée par ces bornes de granit caractéristiques qui séparaient entre 1870 et 1918 la France de l'Allemagne entre Longuyon et Delle, 4056 bornes exactement qui portent le symbole F d'un côté et D, pour Deutschland, de l'autre. On retrouve à la sortie du bois l'activité bruyante du col de la Schlucht.

Photos Peter Gorner et Thierry Jeandel.
Merci à Jean Pierre Savoye pour son livre "La Bresse-le Hohneck Clins d'oeil sur l'histoire".

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Thierry Jeandel - Accompagnateur Montagne